Un discours de Robin Renucci proposé en écho du report de l’extension du musée La Piscine .

Monsieur Delbar, nouveau Maire de Roubaix considère que l’extension du Musée de la Piscine de Roubaix n’est pas une priorité.

Nous proposons à sa réflexion, et à celle des citoyens, ces extraits du discours de Robin Renucci lors des biennales internationales du spectacle de nantes – 23 janvier 2014

Mesdames et Messieurs,

Chers amis, chers collègues,

C’est avec grand plaisir que je réponds ici,renucci discours

En tant que « grand témoin », à la proposition

De partager ensemble un peu de nos visions

Des questions culturelles et politiques, aussi.

Vous me voyez sensible, et surtout honoré,

En cette occasion, de pouvoir vous parler.

Je fais le choix risqué, certes, mais avec entrain,

De m’adresser à vous en vers alexandrins !

Ce plaisir de la rime n’est autre qu’un clin d’œil

Qui restera, j’espère, loin du péché d’orgueil…

Sans prétention aucune, c’est une tentative

Pour toucher votre oreille, pour la rendre attentive,

Et pour vous faire entendre aujourd’hui, autrement,

Ce que je veux vous dire le plus précisément.

Retenons le concept qu’Edgar Morin propose :renucci

Nous vivons aujourd’hui une « métamorphose ».

Quand, sur le plan technique, nous voilà triomphants,

Sur le plan culturel, nous restons défaillants.

Technologies nouvelles, ouverture des frontières,

Les réseaux dits sociaux (liaisons singulières),

Les pays émergents qui veulent de la place

Le travail, la famille… Tout cela se déplace.

Si les marchés s’adaptent et, souvent, s’y prélassent

Nombreux sont ceux que de tels changements fracassent.

Ils sont tentés, alors, de tourner leur regard

Vers des solutions radicales, ou barbares :

Replis sur soi, violence et tentations racistes

Et l’appel à la haine, le communautarisme…

Le populisme gagne, séduit une jeunesse

Que le désoeuvrement soumet à la détresse.

Phénomène inquiétant qui menace l’Europe,

Ce contexte est pesant, il marque notre époque.

 

C’est pourtant bien ce monde qu’il nous faut affronter

Qui, dans notre pays, laisse sur le côté

Près de soixante pour cent de nos concitoyens,

Abandonnés, privés d’un emploi, de moyens.

« L’humaine condition », rappelée par Montaigne,

Impose d’écouter ces voisins qu’on dédaigne.

…/…

Plutôt qu’être soumis à l’industrie du signe

Qui vide nos cerveaux d’une manière indigne,

Autant qu’apprendre à lire, à écrire, à compter,

Il faudrait exiger que chacun puisse « dire »,

Retrouve, par les mots, toute sa dignité,

Aime la complexité du sens qu’ils inspirent,

Affirme sa présence, cesse d’être une cible

Anonyme du marché, qui nous rend invisible.

Il en va de l’honneur de pouvoir bien parler.

Pouvoir nommer le monde, c’est le faire exister,

C’est se l’approprier autant qu’il est possible

Et se tenir debout pour devenir audible.

Faire appel aux poètes, au texte, à la langue,

Lui rendre sa saveur, la sortir de la gangue,

Préciser la rythmique, la syntaxe et le sens

Des mots, pour donner à chacun force et conscience.

Voilà les approches que nous privilégions

Tant dans nos productions que dans nos formations.

Ce choix est politique autant qu’il est possible,

Et chaque citoyen peut y être sensible.

Oser savoir, se questionner, dire « que sais-je »

Est encore de nos jours un cruel privilège.

L’égalité n’est pas une affaire de chance

Mais de droit, et ce droit commence dès l’enfance.

…/…

L’éducation par l’art pourrait changer l’école.

« L’expérience » est centrale et non périphérique.

Elle prépare chacun à sa « piste d’envol ».

C’est une éducation des plus démocratique

Qui change le rapport de l’enfant au savoir,

Aiguise sa pensée, son regard, sa mémoire.

Plutôt que voir toujours en l’autre un adversaire,

L’éducation par l’art en fait un partenaire.

L’enfant passe du bavardage à la parole,

De l’excitation à la concentration,

Il découvre le geste sans gesticulation.

Une telle éducation donne sens à l’École.

Discours de Robin Renucci – biennales internationales du spectacle de nantes – 23 janvier 2014

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